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Agé de 85 ans, El Hadj Alpha Mamadou BARRY est à lui tout seul une véritable bibliothèque vivante : il a vu naitre la cité de l’alumine et a participé à la construction de l’usine. Il est arrivé en août 1957 et n’en est plus reparti. Aujourd’hui, il coule une retraite tranquille dans sa maison de Bowal entouré de ses petits-enfants.
A celui qui est le père de Billo, Bademba (ARSYF), et Kembo entre autres, nous avons tendu notre micro et recueilli pour vous son précieux témoignage à l’heure où il est encore question du cinquantenaire de la première et toujours unique d’alumine en terre africaine.
Friainfo : Bonjour El Hadj ! Peut-on mieux vous connaitre ?
El Hadj Alpha Mamadou BARRY : Je m’appelle El Hadj Alpha Mamadou BARRY. Je suis aujourd’hui âgé de 85 ans et suis père de 20 enfants.
Friainfo : Quand et comment êtes-vous arrivé à Fria ?
El Hadj Alpha Mamadou BARRY : Je suis arrivé à Fria le 1er Août 1957. C’était un vendredi. A l’époque, l’emplacement actuel de l’usine était vierge et il y avait une immense forêt. Il n’existait même pas la route d’ici à Tormelin, c’est nous qui avons fait la route de Foto à Fria au compte de la société DUMEZ. Nous étions basés à Foto, c’est pourquoi ce lieu est aussi appelé DUMEZIA.
Friainfo : En quoi consistait votre travail ?
El Hadj Alpha Mamadou BARRY : Je travaillais d’abord à Faranah avant d’être muté vers Fria. J’étais contrôleur de travaux avec DUMEZ, la société qui a réalisé tout les travaux de bétonnage dans l’usine.
Nous avons réalisé de grands travaux tel que le décapage du sol de l’usine : la terre noire a été envoyée à Tigué où on extrait de la latérite pour venir remblayer le sol de la plate-forme des ateliers.
Friainfo : L’histoire dit que l’usine devait être plus grande que celle qu’on connait aujourd’hui. Est-ce vrai ?
El Hadj Alpha Mamadou BARRY : Oui, c’est pour cela qu’au départ, on avait commencé la construction de deux ateliers de concassage. Le 1er a été achevé en 1959 mais le 2ème a été abandonné à cause de l’indépendance.
Friainfo : Après le lancement de l’usine et le départ de DUMEZ, comment vous êtes-vous retrouvé ?
El Hadj Alpha Mamadou BARRY : Au départ de DUMEZ, nous avons été confiés à la Compagnie FRIA qui n’a pas voulu de nous. Nous avons du travailler un moment avec l’Entreprise DIAFODE KABA. Cela a duré cinq avant de nous reverser dans une coopérative. Mais en 1965, à cause d’une grève des coopératives, Sékou TOURE les a dissous et la plupart des travailleurs ont rejoint les effectifs de la Compagnie. 66 personnes au total.
Friainfo : Vous avez travaillé combien d’années ?
El Hadj Alpha Mamadou BARRY : En tout 32 ans. J’ai passé 11 ans avec DUMEZ, 5 ans chez DIAFODE KABA, quelques mois dans les coopératives et 15 ans à la Compagnie FRIA.
Je suis à la retraite depuis 1980.
Friainfo : Quels changements voyez-vous entre la Fria d’avant et celui d’aujourd’hui ?
El Hadj Alpha Mamadou BARRY : Oh, il y a eu trop de changements. On ne peut même pas vous expliquer de peur de ne pas être pris au sérieux.
Friainfo : Quel est le meilleur souvenir que vous gardez de votre temps de travail ?
El Hadj Alpha Mamadou BARRY : Sans conteste, c’est le jour où Sékou TOURE nous a fait intégrer la Compagnie Fria. Avant ce moment, on a connu des moments difficiles. Par exemple, on ne pouvait même pas monter de leurs travailleurs.
Je me rappelle aussi du jour du référendum en Septembre 1958. Nous avons nettoyé les lieux à la Cité de démarrage avant le vote. Nous avons opté massivement pour le non mais hélas, on connait la suite.
Friainfo : On fête actuellement le Cinquantenaire de l’usine. Le fait que vous, les anciens, avez été mis aux oubliettes ne vous a-t-il pas un peu frustrés ?
El Hadj Alpha Mamadou BARRY : C’est quand même une petite déception.
Friainfo : Quels conseils donneriez-vous à la jeunesse d’aujourd’hui ?
El Hadj Alpha Mamadou BARRY : Je leur demanderais de faire preuve de beaucoup de courage et de patience dans la vie car ce n’est pas facile d’avoir des repères surtout à l’heure de la mondialisation.