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Depuis maintenant deux jours, le collège syndical et l’ensemble des travailleurs observent une grève à l’usine de Fria. Seuls le personnel posté et les agents d’astreinte assurent le service minimum. La chaine de production est entièrement à l’arrêt et tout est calme. Pour l’instant, la ville est normalement alimentée en électricité et en eau.
Encore une fois, le personnel et la direction en arrivent à cette situation après plus de trois mois de trêve. En décembre 2011, la direction a refusé toute négociation salariale malgré la hausse conjuguée du coût de la vie et du carburant survenue en octobre. Elle invoquait alors des motifs de crise internationale. Si la crise est certaine, sachez que Rusal traverse en même temps une grave crise interne si l’on en croit l’agence Reuters. L’article ajoute même « que la compagnie est confrontée à une crise profonde qui fait qu’en voulant se transformer en leader international de l'aluminium elle se retrouve en une entreprise ployant sous les dettes et impliquée dans nombre de procédures juridiques et de conflits sociaux. »
Les travailleurs de Friguia estiment pour leur part que Rusal veut les faire trinquer pour ses erreurs de stratégie et de gestion et n’entendent pas céder sur les points de revendications. A la demande expresse de Rusal, une médiation du ministre des Mines et de l’inspectrice générale du travail avait été menée au mois de décembre. Une commission aurait dû être mise en place pour régler le différend. N’ayant reçu aucune suite, le collège syndical a déposé un préavis de grève qui a donc pris effet le mercredi 4 avril.
Plus tôt, en mars, la Direction avait pris la décision de menacer de licencier tous les membres du collège syndical pour « actes d’indiscipline ». Il ne faisait aucun doute que ce n’était qu’une manœuvre de plus pour les dissuader d’aller à la grève. Le représentant de Rusal en Guinée, Mr VLASSOV avait même osé dire sur les ondes de la RTG qu’il a pris ces mesures pour discipliner Fria à l’image de la CBK à Kindia.
Dans ce climat de tension, le ministre des mines qui n’était jamais venu à Fria depuis sa nomination, a tenté une mission de la dernière chance le 22 mars. Au cours d’un meeting, il a rencontré les travailleurs et le collège syndical. Il a expliqué le contexte difficile que traverse notre pays et a demandé de surseoir à toute grève jusqu’après les élections législatives. Sa demande n’a bien sûr pas été entendue. A quelques jours de l’expiration du préavis, Rusal a dessaisi l’Inspection Générale du travail pour porter l’affaire devant le Tribunal du travail. Les avocats choisis par les travailleurs ont demandé la récusation du Juge qu’ils n’estiment pas impartial dans ce dossier. Et depuis le lancement de la grève, Rusal a encore ramené l’affaire devant l’Inspectrice générale du travail pour arbitrage. S’estimant frustrée après un premier dessaisissement, elle a demandé à Rusal de retirer sa plainte du Tribunal de travail avant qu’elle ne s’occupe du dossier à nouveau. Pour l’instant, nul ne sait s’il s’agit d’une manœuvre désespérée ou d’une réelle volonté de négocier enfin.
Cette affaire survient dans un climat d’agitation sociale et syndicale généralisée. Il y a une dizaine de jours environ, les collèges syndicaux du secteur minier s’étaient rencontrés lors d’un forum à Sangarédi. Ils avaient pour objectif de créer un syndicat minier unique en Guinée. Il est prévu entre autres une amélioration des conditions de travail, salariales et sociales dans le secteur.
A l’unanimité, les collèges syndicaux miniers ont réaffirmé leur soutien indéfectible au collège syndical de Fria et ont mis en garde autorités et opérateurs miniers contre tout acte visant les responsables de la grève. De plus, ils ont exigé que le contentieux trouve rapidement une issue favorable.
Faute de quoi, ils enclencheront à leur tour une grève jusqu’à satisfaction de toutes les revendications.